Il n’y a pas que la « nouvelle scène anglaise » qui agite la jazzosphère des années 2010. A Chicago aussi, un gang d’agités inspirés empêche le jazz de tourner en rond. Et derrière le charismatique batteur Makaya McCraven, le plus médiatisé d’entre eux, se cachent une poignée de rebelles tout aussi passionnants parmi lesquels figure l’extraterrestre Jaimie Branch. La trompettiste trentenaire, membre actif du label local International Anthem Records, donne ici une suite déroutante et folle à son déjà déroutant et fou Fly or Die de 2017 ! Avec Fly Or Die II : Bird Dogs of Paradise, Branch souffle mais chante aussi. De sa bouche sort un virulent discours libertaire, féministe, antiraciste et anti-establishment ayant des allures de brûlot politico-social. Cette fille spirituelle de Lester Bowie, Don Cherry et Booker Little ne se contente surtout pas exclusivement du vecteur jazz pour faire passer ses idées de notes ou de mots. L’Amérique est un patchwork, la musique de Jaimie Branch aussi. Du jazz donc, free ou cabossé, mais aussi du blues, des sonorités amérindiennes ou de la musique contemporaine et avant-gardiste qu’elle répand par chuchotement ou hurlement selon le message à véhiculer. On n’entre évidemment guère facilement dans cette magnifique somme de bruit et de fureur mais sa densité, sa radicalité et à l’arrivée sa beauté méritent qu’on prenne le temps d’en apprécier chaque recoin. © Marc Zisman/Qobuz