Pour son premier album solo depuis six ans, le producteur chilien continue d’ouvrir de nouvelles routes pour la musique électronique, guidé par sa curiosité pour les accidents sonores et un refus de la facilité au moment de composer. Après avoir imaginé une messe noire dans un monde parallèle avec son groupe The Desdemonas (sur Sofarnopolis, sorti l’an passé chez Crammed), Aguayo s’attaque à la polyrythmie et plus largement aux grilles de programmation qui “sortent du 4/4 eurocentrique”, madeleine des producteurs électroniques contemporains les plus exigeants et les plus audacieux (comme Cut Hands et Don’t DJ). En superposant différents rythmes, le Chilien semble avoir trouvé la voie idéale pour développer le dialogue multilatéral entre les styles de musique qu’il prêche, à l’opposé de l’assimilation culturelle, quasiment devenue une technique marketing dans l’industrie de la pop.
Il montre avec brio la route – sinueuse et périlleuse – à suivre tout au long de ce disque, à l’instar de We Have Seen Another World, qui mêle syncopes chamaniques et basse noire tendance industrielle, formant un rythme entêtant et surtout envoûtant, tout aussi transcendant que 2019, grand mix entre trap, cumbia et synthés des 90’s. Des titres qui ont même provoqué de nouvelles manières de danser lors de ses DJ sets. Une nouvelle preuve que c’est en sortant des sentiers battus qu’on fait avancer le grand schmilblick de la musique. © Smaël Bouaici/Qobuz