Difficile de se faire un prénom lorsqu’on s’appelle Pollini, difficile aussi d’éviter les sarcasmes des envieux de tous poils. Daniele Pollini a évidemment été baigné d’art, d’architecture et de musique depuis sa plus tendre enfance. Milanais jusqu’au bout des ongles, il a commencé le piano presque bébé avec sa grand-mère pianiste, puis s’est passionné pour les sciences naturelles et la peinture qu’il a pratiquée en même temps que la musique. Admiratif de son père, il l’est surtout de Benedetti Michelangeli, Horowitz, Richter et Schnabel, une façon de concilier les deux aspects de sa propre nature oscillant entre cérébralité et intuition.
À l’âge de 20 ans, Daniele hérite de la splendide maison de son grand-père, le célèbre architecte Gino Pollini. C’est dans ce lieu idéalement propice à son épanouissement, situé au cœur de Milan, que le jeune homme vit entouré de ses livres et de son piano. Si son amour pour sa ville natale, véritable capitale culturelle de l’art contemporain, de la musique, de la mode et du design stimule et nourrit son imagination, il ne l’empêche pas de séjourner dans ses autres villes favorites, Paris, Rome et Venise. On avait apprécié récemment Daniele Pollini à quatre mains avec son père dans la suite En Blanc et noir de Debussy. Le voici, seul désormais, pour son premier disque publié par Deutsche Grammophon (DG) avec un programme aussi intelligent qu’audacieux qui tisse les liens d’une filiation, partant des Études Op. 10 de Chopin pour arriver au célèbre Klavierstück IX de Stockhausen en passant par les œuvres ultimes de Scriabine. Passionnant voyage commencé dans le romantisme qui trouve des résonances mystiques en passant par la Russie, pour s’achever dans les non-dits d’un Stockhausen hors de toute influence germanique et qui regarde plutôt vers les compositeurs de l’avant-garde américaine comme John Cage et Henry Cowell. © François Hudry/Qobuz