Attention chef-d’œuvre ! Déjà complices au sein du quartet du batteur Billy Hart (All Our Reasons en 2012 et One Is the Other en 2014), Mark Turner et Ethan Iverson s’échappent pour la première fois en duo un peu à la manière du tandem mythique Warne Marsh/Lennie Tristano. Sauf qu’ici, le saxophoniste et l’ex-pianiste de The Bad Plus font de leur rencontre un instant de jazz quasi chambriste. Leurs échanges tout au long de ces Temporary Kings vont au cœur de l’intimité. Sans doute l’un des meilleurs ténors de sa génération, Turner souffle de façon unique, loin des canons coltraniens, de petites phrases souvent inattendues. Iverson, dans un esprit évoquant Paul Bley, fait murmurer ses doigts, livrant notes et accords à l’économie. Ensemble, ils accostent parfois sur les rives du Third Stream, le courant de Gunther Schuller qui synthétisa, à la fin des années 50, musique classique européenne et jazz. Mais Mark Turner et Ethan Iverson conservent surtout un grand naturel dans leurs improvisations. Même lorsqu’elles peuvent paraître un brin cérébrales. Surtout, ils ne lâchent jamais le fil solide de leurs narrations plus belles les unes que les autres. © Marc Zisman/Qobuz