Le compositeur états-unien Lou Harrison (1917-2003), infatigable inventeur et innovateur, avait déjà épousé la cause de la « world music » ou plutôt « la musique du monde » avant que la mode ne porte même ce nom de « world music » qui finirait d’ailleurs par perdre son sens, du moins dans la sphère francophone. Cet album témoigne de son rôle de pionnier en tant que compositeur pour les percussions, autant que sa capacité à intégrer et associer les idiomes occidentaux et indonésiens. Le Concerto pour violon et percussion, dont les deux premiers mouvements datent déjà de 1940 avant qu’il ne les modifie en 1959 et rajoute un troisième mouvement au passage, montre son enthousiasme d’explorer le monde de la percussion aux sons indéterminés – autrement dit, les percussions qui ne produisent pas de « notes », comme les xylophones, les cloches, les marimbas etc., mais des sons que l’on ne peut pas attribuer à une hauteur précise. Toute la partition comporte d’ailleurs des précisions des plus détaillées de la part du compositeur – qui fait appel à quelques percussions assez inhabituelles, c’est le moins que l’on puisse dire – telles que « pour les bassines, percer des trous sur les côtés de baquets en galvanisé et les suspendre, retournés, par de forts élastiques » et tant d’autres aussi satiesques. Le Grand Duo pour Violon et Piano (1988) est un remarquable exemple de musique de chambre inspirée du gamelan indonésien, ce qui n’est pas une mince affaire considérant que le gamelan traditionnel n’utilise pas les gammes tempérées occidentales, ce qui les rend bien difficiles à évoquer au piano. Enfin, Double Music de 1941 est un ouvrage écrit en collaboration étroite avec John Cage, avec force percussions de toute la sphère asiatique. Cet enregistrement de la musique si puissamment originale de Harrison est signé du violoniste Tim Fain, du pianiste Michael Boriskin, et du PostClassical Ensemble que dirige Angel Gil-Ordóñez. © SM/Qobuz